3 rues du 12e en hommage à 3 femmes
mars 8, 2017 dans A la une, A vos côtés, Non classé par Catherine Baratti-Elbaz
Mesdames les Présidentes d’association,
Madame la Directrice Générale de la SNEF,
Monsieur le Directeur du conservatoire,
Madame la Députée,
Madame la Principale, Mesdames et Messieurs les Professeurs du collège Paul Verlaine,
Mesdames et messieurs les élus,
Les enfants,
« Simple, forte, aimant l’art et l’idéal, brave et libre aussi, femme de demain ne voudra ni dominer, ni être dominée ». Cette femme de demain décrite par Louise Michel, il y a plus d’un siècle, est la femme que nous célébrons aujourd’hui, en cette journée internationale de lutte pour les droits des femmes.
A Paris, au nom de l’égalité, nous portons l’ambition de rééquilibrer les dénominations des voies et des bâtiments de notre belle capitale, au profit des femmes aux destins exceptionnels et dont les lumières nous aident à comprendre notre présent. Nous sous sommes donc saisies des opportunités offertes par le projet Charolais Rotonde pour y parvenir et j’en suis très fière. Je remercie la SNEF de nous avoir accompagnés dans ce projet. Nous continuerons dans ce sens avec une voie qui devrait porter le nom d’Edmonde Charles Roux dans le projet Gare de Lyon Daumesnil.
Simone Iff, Louise Hervieu et Gertrude Stein sont trois figures féminines qui ont marqué le 20e siècle de leur empreinte, réunies ici, dans ce nouveau quartier du 12e arrondissement. Leur courage sans faille, leur inébranlable liberté, leur indépendance idéologique, sexuelle, artistique ont permis à notre pays de s’engager vers des progrès que nous ne souhaiterions perdre pour rien au monde. Cette journée du 8 mars est une belle occasion des les honorer.
Il est difficile de résumer les parcours de ces femmes hors du commun.
Gertrude Stein, artiste américaine aux multiples talents était à la fois poétesse, dramaturge, muse et mécène. Homosexuelle assumée courageusement, elle s’installa dans notre capitale d’où elle influença durablement la scène artistique parisienne. Sa collection de peintres aussi célèbres que Picasso, Matisse, Renoir, Gauguin… sera malheureusement dispersée à sa mort. Je suis sure qu’elle aurait été heureuse que cette place porte son nom, devant notre conservatoire municipal, lieu de pratiques artistiques pour tous.
Louise Hervieu, artiste de talent, dessinatrice poétique et écrivaine honorée par l’Académie Française et le prix Femina, était une femme de progrès, à qui l’on doit une avancée majeure dans le monde de la santé publique et de l’accès aux soins.
En 1937, elle s’est saisie de sa voix d’artiste pour dénoncer les dangers du silence qui régnait autour des questions de santé héréditaire dans la société française et son combat en faveur de la mise en place du carnet de santé nous a permis de bénéficier d’un service de santé publique plus égalitaire.
Je suis fière de lui rendre hommage dans cet arrondissement qui compte l’un des plus grands centres hospitaliers pédiatriques à Trousseau. Cette rue qui porte son nom restera la 1ère rue de Paris plantée de pommiers, elle qui a peint avec tant de talents ces fruits dans ses natures mortes.
Enfin, Simone Iff, figure du féminisme, première présidente du Mouvement français pour le planning familial, est l’une des femmes à qui nous devons l’un des derniers droits acquis par les femmes françaises. Militante du droit à l’avortement et fervente avocate de la liberté sexuelle de la femme, elle donna un sens réel à la revendication « Notre corps nous appartient ». Je remercie ses enfants d’être parmi nous aujourd’hui. Nous lui devons beaucoup de choses, nous leur devons énormément.
Elle qui a toujours travaillé aurait peut être apprécié que le prestigieux institut de recherche publique en informatique appliquée se soit installé dans « sa rue ».
Ces trois femmes ont en effet fait des études et travaillé, ce qui à leur époque est loin d’être une évidence. Elles ont toute connues au cours de leur vie l’obscurantisme et l’oppression nazie, qu’elles l’aient combattu, qu’elles s’en soient cachées ou qu’elles l’aient vécu en silence. Cette période ne les a pas empêchées de poursuivre leurs combats et de nourrir leur passion. Elles ont résisté, à leur façon.
Ces femmes ne se définissent pas par le regard qu’on porte sur elle mais bien par le regard qu’elles portent sur la société. Aujourd’hui aucun pays ne peut se prévaloir d’être parvenu à instaurer l’égalité entre les hommes et les femmes. En ce jour particulier, je vous demande de vous rappeler que ce combat n’est pas terminé, c’est un combat que l’on doit mener au quotidien avec nos aînés comme avec nos enfants.
Comme le disait Simone Weil « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique économique et religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question » et la crise n’est jamais très loin.
Je vous remercie.